A
trop solliciter le petit d'Homme, le risque est grand ; effectivement,
trop « boostés » cérébralement,
certains profils d'enfants peuvent refuser la stimulation et punir
les parents en se repliant sur eux-mêmes.
Il
n'est pas question ici de critiquer et encore moins de contester
l'intérêt du jouet d'éveil et du jeu éducatif
mais il demeure impératif de respecter l'évolution
propre de l'individu.
Jouer
s'avère, avant tout, un plaisir indispensable, d'autant
qu'instinctif, et comme l'a souligné Winnicott, s'amuser
est thérapeutique en soi. Cependant, des observations
récentes et sérieuses - notamment en Angleterre
- tendent à démontrer qu'une dérive trop
éducative dans le domaine du jeu s'installe progressivement,
encouragée par les parents eux-mêmes. Il est une
évidence que les adultes cautionnent une surenchère
commerciale et, chaque année, un panel de jouets nouveaux,
qui délaissent l'imaginaire, atteste d'un risque réel.
Sophistiquer
l'approche du jeu le détourne pernicieusement de son rôle
essentiel et structurant et les enfants le montrent bien, préférant
souvent les épingles à linge et autres bouts de
bois pour exprimer leur créativité.
Le
jouet ne doit pas être récupéré par
les adultes ! Jouer ne peut en aucun cas être dissocié
de la fonction imaginaire et à trop vouloir symboliser,
donc ordonner le jeu, la société actuelle en oublie
l'étymologie du mot qui découle du latin jocus,
signifiant plaisanterie. C'est, de toute façon,
sans compter sur les réactions de défense inconscientes
; ainsi, les projections agressives, qui ne demandent qu'à
être expulsées sur le simple bout de chiffon ou autre
doudou, sont-elles refoulées en la présence d'un
objet surmoïque, surmoïque dans le sens où il
s'apparente d'évidence à une notion d'éducation
par trop précoce. Le transfert peut s'en trouver
regrettablement modifié au point qu'une régression
affective puisse se mettre en place si l'adulte confond lui-même,
temporellement, le jouet et le jeu. Le distinguo s'impose et appelle
à la vigilance. Ainsi, si l'enfant développe une
attitude pathologiquement défensive face à un objet,
il traduit alors une angoisse (dite de castration) qui signale
un refus identificatoire à prendre sérieusement
en compte. Cette difficulté, cet évitement, implicitent
un investissement anormalement négatif de l'objet qui peut
entraîner le renversement de la pulsion dans le contraire.
Le retrait de la libido sur le moi intervient alors comme
une résonance à l'impossibilité de pouvoir
faire-semblant. Il s'avère donc primordial de
ne jamais oublier que si jouer n'est pas contraindre, s'amuser
ne se commande pas.
|