Chaque individu possède son
potentiel de réussite. L’essentiel est de faire le distinguo entre jouissance
et désir d’une part et entre faux-self et vrai-self d’autre part, ce qui, du
reste, revient à peu près au même…
L’inconscient
s’étant élaboré entre zéro et quatre à six ans maximum, il faut, de fait,
prendre en compte une certaine immaturité chez l’être humain, quelles que
soient ses origines sociales ou ses réalisations en tant qu’adulte ;
d’ailleurs, cette immaturité jaillit souvent, à notre insu, dans nos réactions
ou nos conduites ; il faut bien le reconnaître, dès que l’occasion se présente,
nous nous comportons comme des enfants ! Mais même si la plupart du temps, ce
n’est pas désagréable, ce processus peut aussi nous jouer des tours,
et surtout, nous amener à vivre des situations dont nous nous serions bien
passés… Alors pourquoi ?
Sortir de la confusion identitaire
Dans
la notion de jouissance, il faut entendre comme une sorte de compensation
permettant de supporter certaines insatisfactions inhérentes à la relation
primaire parents-enfant ; il s’agit ainsi d’un deal à l’intérieur
de soi, état qui pourra réactionnellement perdurer au cours de l’existence.
Effectivement, l’inconscient ayant toujours peur de perdre l’amour d’un autre,
ses conduites s’étayent à la fois sur cette angoisse du manque et, par voie de
conséquence, sur le fantasme qu’en étant ce que l’autre veut, qu’en faisant ce
que l’autre décide, il obtient tout ce qu’il a. De cette séduction obligée naît
progressivement une confusion identitaire puisque, petit à petit, l’individu se
laisse modeler. Autrement dit, il ne s’agit pas d’être pilote de
ligne pour séduire inconsciemment maman-papa si, fondamentalement, on est fait
pour être carreleur ! Un carreleur heureux est un homme qui a trouvé la distance
juste entre lui et l’autre ; certes, il a pris le risque de s’opposer à la
domination de cet autre, certes, il s’est auto-frustré mais pour mieux
accoucher de son désir ; et de ce vrai-self jailliront des conduites de plus en
plus évolutives ; il en résultera une vie faite d’accomplissements
enrichissants, et ce, à tous les sens du terme.
Cependant,
pour en arriver à la mise en place d’un vrai-self, il faut essentiellement
écouter la vie, observer sa vie, et se poser des questions. Cette perspective
de son histoire en miroir se révèle déjà annonciatrice de tous les changements,
de tous les possibles. Et paradoxalement, de question en questionnement, les
pensées négatives se diluent, le voile se déchire et cette impression d’être
malheureux disparaît progressivement. Prenant l’habitude d’aborder le quotidien
avec une méthode de vie, la méthode de mort finit par céder. Ainsi, de
désorienté qu’il était, l’individu développe l’opportunité d’aborder
l’essentiel, c’est-à-dire son histoire comme une ouverture, comme un jeu de
piste qui invitent, au travers d’expériences, à aboutir à une confiance en soi
suffisante, synonyme de réussite.
Mais
de quelles questions s’agit-il ? En fait, la vie s’avère plus parlante, plus
expressive, plus explicite que ce que l’on peut le penser. Il s’agit de repérer
– et cela est facile – ce que la psychanalyse envisage comme des compulsions de
répétitions et, bien sûr, tous les scenarii négatifs qui se reproduisent, a
priori à notre insu, nous transformant régulièrement en victime :
-
Pourquoi en suis-je à mon troisième accrochage en voiture en me rendant au
travail ? Pourquoi, tous les étés, à la veille de boucler mes bagages, je
"fais" une angine ? Pourquoi chaque fois que mon mari part en
déplacement professionnel je déprime ? Pourquoi les femmes me
"plaquent"-elles en général ? Etc, etc.
Il
s’agit donc bien de mettre sa souffrance en miroir car, si la souffrance se
veut familière, à nous de ne pas en faire une étrangère ! Effectivement, à trop
la côtoyer, elle ne signifie plus rien. Alors, faisons bouger la
"fatalité"… Et comment (!) ?
Devenir soi-même !
Pour
changer de vie, il faut tout d’abord envisager la réussite, en première
intention, comme de l’ordre de l’être et surtout pas de l’avoir ; le reste
viendra de surcroît… L’impératif consiste à devenir soi-même et ce
must de la liberté, tout le monde peut se l’offrir… Autant dire,
tout le monde peut réussir ! Voilà bien ici un beau projet et, encore une fois,
auquel chacun de nous peut accéder.
Etre,
c’est-à-dire être adulte, consiste à supprimer l’état de victime, la position
de dominé, sans vouloir briguer du reste le corollaire inversé :
bourreau/dominant. Etre, c’est prendre conscience d’emblée de ce que l’on ne
veut plus et ainsi ce que l’on veut devient possible :
-
Je ne veux plus que ma sœur téléphone systématiquement à l’heure du repas le
dimanche...
Etre,
c’est refuser les conflits intérieurs qui vampirisent une énergie phénoménale,
au point de ne plus pouvoir mobiliser les forces nécessaires à l’effort de…
réussite. Freud a nommé "ça", cette instance de plaisir débridée
logée à l’intérieur de nous, diktat des voies faciles, instance envahissante à
souhait et qui nous empêche, le plus souvent, de re-fléchir. Alors comment
tordre le cou au ça malin, coquin, séducteur des séducteurs, qui va jusqu’à
nous donner l’illusion que vivre c’est se jeter à corps perdu dans le loisir et
l’oisiveté ?
Il faut dire que la société de consommation actuelle, par
publicités interposées, ne nous facilitant pas la tâche, il devient nécessaire
de s’armer d’un sacrée dose de sagesse pour mettre à profit tout projet de
réalisation.
Il
est d’abord nécessaire de regarder l’existence afin de repérer si l’on est dans
le bon sens, c’est-à-dire si aujourd’hui apparaît mieux qu’hier afin que demain
soit mieux qu’aujourd’hui. Voilà bien le bon sens… Sinon,
réagissons tout de suite ! Car, si la solution existe, se colleter au principe de plaisir n’appartient pas au domaine de la facilité, la
satisfaction étant son locataire privilégié. Conquérir le ça, pour qu’il se mette
en sourdine, n’est pas chose aisée. Ainsi peut-on décider, pour des raisons
médicales, d’arrêter de fumer et, malgré notre bonne volonté, c’est mission
impossible ! Dites-vous alors que le ça en a décidé autrement. Autres exemples
: chercher du travail et ne pas en trouver, ne pas rencontrer l’âme sœur malgré
des attitudes d’engagement et un contrat en agence matrimoniale…
Toutes
ces impossibilités, tous ces échecs, pour des raisons inconscientes propres à
chacun, sont à attribuer au ça paresseux et velléitaire ;
effectivement, il s’agit là d’une instance partisane du moindre effort ! Le
problème c’est qu’au commencement était le ça et il faut faire
avec… Mais encore une fois, le ça n’en fait qu’à sa tête ! Heureusement que
nous possédons à l’intérieur de nous le surmoi, juge et censeur de notre vie,
sorte de gendarme assurant l’ordre et travaillant surtout continuellement à
remettre en place son voisin, impulsif et excité. C’est donc grâce à cette
deuxième instance que nous pouvons réguler les élans désordonnés du ça et
qu’ainsi la réussite devient possible… Cette conquête légitime prend en compte
l’axe élaboration construction-réalisation.
Quand
un adolescent rencontre des difficultés scolaires, lui aussi est victime d’une
vie inconsciente complexe, tout complexe étant une lutte acharnée entre le ça et le surmoi ; c’est le moi, donc le soma, le corps, qui en fait les frais et
ce, d’autant plus que cette lutte vide les réservoirs énergétiques ! L’élève
parle alors de fatigue ; il devient rêveur (ou raveur ?) en cours
et finit par décrocher…De lacune en lacune, l’échec scolaire se met en place.
Bien qu’écouté par sa famille, compris par ses enseignants, son entourage
n’enregistre aucune réaction constructive…
Où se trouve la solution ?
La
solution ne peut s’envisager qu’en composant avec le couple infernal ça-surmoi,
soit en déclenchant le plaisir d’apprendre chez l’étudiant ou en suscitant le
plaisir d’évoluer chez l’adulte. Ainsi les deux instances rivales vont-elles y
trouver leur compte ! Cependant, notre conception du comment
réussir ou du comment s’en sortir repose sur des habitudes
qui nous rassurent au point de ne plus nous rendre compte. Fumer peut relever,
entre autres, d’une gestuelle, d’un rituel et, complaisamment, échouer peut appartenir
à une sorte de règle du jeu qui comporte certains avantages répétitifs,
facilement repérables, comme l’étayage, encouragé par le regard, quel qu’il
soit, compatissant ou sévère, que l’autre jette sur nous… Attirer l’attention
devient en quelque sorte… exister !
Rien
n’est plus difficile que de casser ce schéma. En fait, être pris en compte par
l’autre offre quelques avantages que la psychanalyse appelle bénéfices. Bien
des inconvénients découlent de cette dépendance de par l’aspect
réducteur que le processus enclenche. Les résultats fantasmatiques sont nuls et
l’être humain finit par crouler sous le poids de la survie qu’il a fini par
développer. De cette incohérence, de cette division d’avec soi-même, il
convient de sortir.
Accepter
de changer devient, de fait, la clef de voûte de l’édifice. Renoncer à être ce
que l’on a cru que l'entourage voulait que l’on soit s’impose. De tout cela, dépend
la qualité de la vie. Il ne faut plus compter sur l’autre mais sur soi. Il ne
faut plus attendre du partenaire mais de soi. En d’autres termes, il faut
s’autoriser à s’occuper de soi. Se réconcilier avec soi-même apparaît comme
l’impératif de vie afin de récupérer l’énergie suffisante pour sortir de
l’abîme.
Traverser l’existence s’apparente donc à transgresser des savoirs imposés.
De cette dernière ligne droite dépend tout confort de vie mais cela s’apprend.
Les
éléments clés de cette phase d’apprentissage apparaissent, dès lors qu’on le
décide, plus naturels que l’idée envisagée. Comme les émotions et les sentiments
dominent l’existence, apprenons à en tirer des leçons, c’est-à-dire apprenons à
les identifier et à les reconnaître. De cette consolidation d’avec soi va
découler la qualité du parcours. Très vite, si nous prenons la peine de
réfléchir au problème du moment, on se rend compte que le problème n’est pas
vraiment là. C’est davantage notre résistance à mettre en place une autre façon
de faire qui joue ici un rôle de frein. La recherche du sens
s’impose, de facto, comme fondatrice de l’être humain. Il devient aisé alors
de réaliser que tout agissement auquel on ne donne pas sens entraîne révolte,
opposition, agressivité et pour en terminer, culpabilité. Devient
incontournable, à ce stade, de quitter les limites limitatives, c’est-à-dire
le supposé regard de l’autre et de se recentrer sur soi :
-
Ma femme me trompe : comment me suis-je comporté avec elle pour en être arrivé
là ? Quelles erreurs ai-je commises ?
Le
principe de transformation personnelle se met en route. Quitter la gangue du
déterminisme apparaît inévitable. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le
processus d’échec n’y survivra pas ! En fait, il est question, à ce stade, de
se débarrasser et d’être libre de toute finalité ; en d’autres termes, il
s’agit de quitter le but mais comment décrocher puisque le but
reste à assimiler à l’autre ? Ça coule de source dès l’instant où l’individu
est prêt à entendre que lâcher le but équivaut non seulement à laisser émerger
le désir, mais que le désir est synonyme de passion. Le désir équivalant à
l’inné, la réconciliation d’avec soi émerge et de cette restauration jaillit la
réalisation.
Ne
banalisons pas pour autant la démarche car on est bien loin ici d’une démarche
dont l’entourage serait partie prenante car si tout changement reste douloureux
pour soi, il l’est encore plus pour l’autre. Pourquoi ? En premier lieu, parce
que chacun y perd son rôle névrotique et en deuxième lieu, s’il craint que vous
l’abandonniez, il devra changer lui aussi ! Cependant, si cette démarche
apparaît impliquante pour les deux camps, elle présente en outre l’avantage de
ne pas être imposée.
Ainsi, pour comprendre
nos échecs, il faut écouter notre souffrance, ce qui équivaut à une sorte de
prévention car rien n’est acquis pour la vie… L’existence, toute faite d’énergie,
amène à passer des caps successifs et chaque épisode douloureux survient pour
indiquer que le moment de bouger est arrivé. Nous sommes donc des migrants
perpétuels et de cette acceptation, de ce mouvement répétitif, tel un balancier
d’horloge logée à l’intérieur de nous, dépend notre réussite. Inconscient et
conscient ne doivent plus permettre d’être lieu d’exclusion, mêlé de rancœur et
de haine. Pour ce, un dernier principe consiste à ne plus produire de liens
de causalité en boucle. Et, au lieu de s’acharner à parler de nos
impossibilités, qui ne sont jamais que notre colère à ne pas infléchir tout partenaire,
engageons-nous à ne pas rendre responsable l’entourage de nos échecs. Ainsi
est-il devenu courant d’entendre que les chômeurs professionnels utilisent un
système politique démagogique ; eh bien, ce même chômeur peut me permettre de développer deux fois plus d’opportunités puisqu’il laisse sa place
! Raisonnons plutôt sur les qualités de cet individu mis en miroir qui fait surgir,
par processus dit de réflexion, mes possibilités. C’est ainsi
qu’en identifiant les injonctions de l’autre, j’authentifie mon devenir, le
possible des possibles. Cette vision différente permettra de mettre en place
une nouvelle réalité : un résultat obtenu vaut mieux qu’un objectif à
atteindre…
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